PFW : 3 marques qui repensent la mode masculine 

Juil 1, 2025 | Brands, Fashion

À Paris, la dernière Fashion Week Homme a mis en lumière trois maisons qui bousculent les codes établis. Entre quête identitaire, héritage culturel et poésie visuelle, 3.Paradis, Wales Bonner et Blue Marble offrent une vision élargie — et résolument sensible — de ce que peut être la mode masculine aujourd’hui. Zoom sur trois propositions à la fois intimes, engagées et hautement stylées.

Blue Marble : marcher vers soi

Pour le Printemps-Été 2026, Anthony Alvarez puise dans ses souvenirs d’enfance à Toulon pour construire une collection comme une randonnée intérieure. Sur un podium recouvert de feuilles mortes, les silhouettes avancent telles des marcheurs méditatifs, dans une nature fantasmée.

Le paysage s’imprime sur les vêtements, comme ces pantalons illustrés de reliefs, ou encore ce tee-shirt où l’on peut lire “Beyond”. Chaque message semble ouvrir un horizon. « Each path a hike » annonce une chemise : ici, le vêtement devient métaphore.

Le vestiaire décline les essentiels de l’outdoor : denim large, imperméables oversize, sacs portés sous le bras. Les chapeaux touristiques se transforment en objets hybrides, jusqu’à migrer sur les torses comme un souvenir visuel. Les broderies brouillent les pistes, les messages deviennent cryptés — ce n’est plus l’arrivée qui importe, mais le voyage. Point d’orgue poétique : une chemise décorée de fleurs, comme un trophée végétal du chemin parcouru.

3.Paradis : rêver au milieu du désert

Chez Emeric Tchatchoua, le désert devient terrain d’introspection. Avec sa collection “Steps to Nowhere”, 3.Paradis nous plonge dans une traversée visuelle entre mirage et réalité, entre teintes sablées et éclats fauves. Le bleu indigo, symbole des Touaregs, devient un fil rouge narratif, jusqu’à inspirer une coiffe fusionnant chèche traditionnel et casquette urbaine.

Tout ici est illusion maîtrisée : boutons déplacés, trenchs à double col, pantalons noués par plusieurs ceintures. Même les montres migrent des poignets vers les imprimés, ou deviennent des objets détournés, suspendus à l’allure de talismans.La dernière silhouette, immaculée, presque spectrale, clôt le voyage comme une apparition. Les colombes blanches floquées sur certaines pièces – signature de la maison – viennent réaffirmer le message d’espoir, de paix et de spiritualité qui traverse chaque collection. Chez 3.Paradis, le vêtement est un langage de l’âme.

Wales Bonner : 10 ans de style cultivé

Pour fêter les 10 ans de sa maison, Grace Wales Bonner investit un lieu symbolique : le lycée Henri-IV, haut lieu de savoir parisien. Une manière de rappeler que sa mode, nourrie par la recherche et l’histoire, est avant tout érudite.

Sa collection Printemps-Été 2026, baptisée « Jewel », fait écho au thème du prochain Met Gala (« Superfine: Tailoring Black Style »), sur lequel la créatrice britannique – d’origine jamaïcaine – a travaillé en tant que membre du comité.

Sur les podiums, le tailoring se fait intime. Les shorts, omniprésents, croisent rigueur et sensualité, et traduisent un dialogue constant entre héritage et modernité. Wales Bonner convoque les années 60-70, non comme une nostalgie, mais pour en extraire l’essence : affirmation identitaire, beauté noire, libération du corps et du genre.

Entre costumes oversize, silhouettes préppy et matériaux nobles, la créatrice reste fidèle à son vocabulaire, tout en l’affinant. Sa mode est habitée, elle parle de mémoire autant que de présence au monde.

Une nouvelle grammaire masculine

Avec ces trois propositions, la mode homme s’éloigne des dogmes virils et des silhouettes normées. Elle devient narration, introspection, manifestation de soi.Que ce soit la spiritualité douce de 3.Paradis, l’exploration intime chez Blue Marble, ou la réflexion diasporique et savante de Wales Bonner, chaque collection ouvre un espace d’expression sensible et pluriel. Le vestiaire masculin, loin des stéréotypes, s’enrichit de récits, d’images et de textures, dessinant un avenir où la mode parle aussi de quête intérieure.