Que retenir de cette année 2025 en matière de mode ? 

Déc 30, 2025 | Brands, Fashion, Lifestyle

L’année 2025 aura confirmé une chose : la mode n’est plus un simple terrain esthétique, mais un espace de tensions permanentes. Intelligence artificielle intégrée aux processus créatifs, collaborations parfois déroutantes, campagnes volontairement polémiques, retours en force de pièces cultes… La saison a été rythmée par une succession de temps forts largement relayés sur les réseaux. Dans le même temps, la croissance continue du marché de la seconde main contraste avec des décisions controversées, comme l’arrivée de Shein au BHV Marais, qui a ravivé les débats autour de l’éthique, de l’image et de la responsabilité des acteurs du secteur. Plus que jamais, la mode déborde du vêtement : elle se construit aussi sur les plateformes numériques, façonnée par l’algorithme, la viralité et l’opinion publique.

Maisons de luxe : l’ère des transitions permanentes

En 2025, le grand jeu des directions artistiques s’est intensifié. Les nominations s’enchaînent, les départs se précipitent, donnant parfois le sentiment d’une industrie en perpétuelle réécriture. Le départ éclair de Dario Vitale de Versace, après seulement huit mois, illustre cette instabilité structurelle. Quelques jours auparavant, Olivier Rousteing quittait Balmain, refermant l’un des chapitres les plus marquants de la maison au XXIᵉ siècle.

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Les arrivées, en revanche, ont ouvert de nouveaux horizons. La nomination de Matthieu Blazy chez Chanel concentre de nombreuses attentes : celles d’un équilibre subtil entre héritage et modernité. Chez Bottega Veneta, l’arrivée de Louise Trotter s’impose comme l’une des transitions les plus cohérentes de l’année.À l’inverse, le départ de Jonathan Anderson de Loewe a laissé un vide perceptible, accompagné d’un léger ralentissement de la dynamique de la marque. Le contraste est frappant avec Saint Laurent, qui, sous la direction continue de Anthony Vaccarello, consolide sa position parmi les maisons les plus désirables du moment.

2025 et ses nouveaux fétiches

À contre-courant d’une mode dominée par le storytelling, certaines pièces se sont imposées par leur usage autant que par leur visibilité. Les chaussures de running et de trail ont définitivement quitté les terrains sportifs pour intégrer le vestiaire quotidien. Cette mutation repose autant sur la recherche de confort que sur la capacité des marques à transformer des références techniques en objets culturels.

Dans ce paysage, Nike a retrouvé une place centrale, notamment grâce à des collaborations ciblées — comme celle avec Jacquemus — qui brouillent les frontières entre performance, image et lifestyle.

« It bag un jour, it bag toujours »

La réédition du sac Paddington par Chloé, sous l’impulsion de Chemena Kamali, incarne cette fascination persistante pour les années 2010. Selon le rapport Lyst 2025, les recherches autour du modèle ont bondi de plus de 570 % dès sa relance.

Dans le même esprit, les mocassins — notamment ceux signés Saint Laurent et The Row — enregistrent une forte progression, s’imposant comme de nouveaux essentiels du vestiaire contemporain.

Mais 2025 ne se résume pas à la nostalgie. Les figurines Labubu, omniprésentes sur les réseaux, sont devenues de véritables marqueurs générationnels. Elles témoignent d’un glissement : la mode ne se limite plus aux vêtements, mais s’exprime aussi à travers des objets fétiches, presque affectifs.

Une mode moins centrée sur l’Europe occidentale

Enfin, 2025 marque un élargissement du regard. L’intérêt pour des scènes longtemps considérées comme périphériques s’intensifie. Des labels non occidentaux, comme Fancì Club, basé à Hô Chi Minh-Ville, gagnent en visibilité. Les Fashion Weeks de Dubaï et de Shanghai confirment également leur montée en puissance, s’imposant progressivement comme des plateformes crédibles à suivre.

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Cette décentralisation s’observe aussi à l’échelle locale. En France, la première édition de la Slow Fashion Week de Marseille a proposé une alternative aux circuits parisiens traditionnels : une approche plus ancrée, plus engagée, mêlant défilés, conférences, ateliers et temps d’échange.

Au fond, 2025 n’a pas été l’année d’une révolution brutale, mais celle d’un rééquilibrage. Une mode parfois fragilisée, souvent remise en question, mais surtout en quête de cohérence. Des créateurs attendus au tournant, des produits pensés pour durer, et un regard qui s’élargit enfin au-delà des anciennes capitales dominantes.

Une transition, certes — mais peut-être la plus lucide de ces dernières années.