Qui est Meryll Rogge, la nouvelle directrice artistique de Marni ?

Août 4, 2025 | Brands, Culture, Fashion

C’est une nomination qui en dit long sur les temps qui changent dans l’univers feutré de la mode. La créatrice belge Meryll Rogge prend les rênes de Marni, maison italienne au charme singulier et à l’identité artistique forte. Une consécration pour cette Anversoise discrète mais redoutablement créative — et un signal fort dans une industrie où les femmes restent encore minoritaires à la direction des grandes maisons.

Une trajectoire construite entre Gand, New York et Anvers

Elle est aujourd’hui la seule femme à la tête d’une maison majeure du groupe OTB (Maison Margiela, Diesel, Jil Sander…). Et surtout l’une des rares à occuper ce poste sans avoir fondé la marque qu’elle dirige. Un fait encore trop rare pour ne pas être souligné.

Pourtant, Meryll Rogge n’est pas une inconnue dans les cercles professionnels. Formée à l’Académie Royale des Beaux-Arts d’Anvers, elle débute chez Marc Jacobs à New York, puis revient en Europe pour travailler aux côtés de Dries Van Noten, autre monument de la mode belge. Elle y affine un goût prononcé pour le contraste, la couleur et l’imprimé, tout en cultivant une vision singulière du vêtement.

En 2020, elle fonde sa propre marque, et les récompenses s’enchaînent : Emerging Talent of the Year (Belgium Fashion Awards, 2021), Designer of the Year (2024), Grand Prix de l’ANDAM (2025)… Autant de jalons qui font d’elle l’un des plus beaux espoirs de la création européenne. Son arrivée chez Marni, après le départ de Francesco Risso, marque une nouvelle ère.

Une signature visuelle audacieuse

La mode de Meryll Rogge est tout sauf sage. Dans sa dernière collection, elle convoque des références inattendues : l’artiste Gordon Matta-Clark et un vieux magasin de papiers peints à Gand. Il en résulte un vestiaire-patchwork, fait de motifs floraux, de carreaux, de couleurs vives — un collage textile vibrant.

Chaque pièce raconte une histoire, comme ce pantalon à découpe inversée qui évoque un tablier retourné. Derrière l’effet de style, une réflexion sur le passage du temps et la mémoire des matières. Et surtout, un engagement : la créatrice travaille avec des stocks dormants et pratique l’upcycling, dans une approche responsable qui fait écho aux engagements locaux de Marni, qui fabrique encore dans ses propres ateliers en Italie.

Marni version Rogge : promesse d’un souffle nouveau

Si Marni reste une maison à forte identité — joyeuse, arty, artisanale — elle vit un moment charnière. Moins exposée que d’autres labels du groupe OTB, elle semble prête pour un nouveau chapitre.

Avec Meryll Rogge, la filiation semble évidente : même goût pour l’imparfait, même envie de jouer avec les volumes, les matières, les références culturelles. Son approche ludique, parfois surréaliste, devrait parfaitement s’accorder avec l’ADN poétique et décalé de Marni.

Et pour la mode belge ? C’est une victoire symbolique. Celle d’une créatrice qui fait son chemin sans compromis, avec rigueur, intelligence et intuition. Une femme qui, dans un milieu encore très masculin, redessine les contours du pouvoir créatif. À suivre de très près.